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Pour Aristote, « ce qui a lieu contrairement à notre mérite est injuste."(1) Si l'on adopte le point de vue de la justice distributive, une société juste serait une société où chacun aurait ce qu'il mérite. Ce serait une société équitable, dans laquelle il n'y aurait plus matière à s'indigner (au vu d'un succès immérité) ni à s'apitoyer (au vu d'une infortune imméritée). Les succès comme les infortunes seraient la rançon du mérite. Evidemment, toute la difficulté est de s'entendre sur ce qui constitue le mérite…
Las ! Dans une société juste, les inégalités peuvent bien être plus équitables, elles n'en sont pas moins douloureuses. « Si certaines inégalités de position… font tant souffrir », observe Nozick, ce n’est pas « en raison du sentiment qu’une position supérieure est imméritée, mais du sentiment que c'est mérité et gagné. Savoir qu’un autre est parvenu à un résultat plus grand ou s'est élevé plus haut peut blesser l'amour-propre d’ego et lui donner le sentiment d'une valeur personnelle moindre » (2). De ce point de vue, la démocratie ouvre des boulevards à l'envie.
C’est dire qu’une société juste, du point de vue du réformateur social, ne serait pas nécessairement perçue comme telle par le public. Notamment cette partie du public, les envieux, qui estiment n'être pas à la place qu'ils méritent. La majorité ?
Las ! Dans une société juste, les inégalités peuvent bien être plus équitables, elles n'en sont pas moins douloureuses. « Si certaines inégalités de position… font tant souffrir », observe Nozick, ce n’est pas « en raison du sentiment qu’une position supérieure est imméritée, mais du sentiment que c'est mérité et gagné. Savoir qu’un autre est parvenu à un résultat plus grand ou s'est élevé plus haut peut blesser l'amour-propre d’ego et lui donner le sentiment d'une valeur personnelle moindre » (2). De ce point de vue, la démocratie ouvre des boulevards à l'envie.
C’est dire qu’une société juste, du point de vue du réformateur social, ne serait pas nécessairement perçue comme telle par le public. Notamment cette partie du public, les envieux, qui estiment n'être pas à la place qu'ils méritent. La majorité ?
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On peut résumer schématiquement la relation entre Réussite et Mérite, avec les quatre types de sentiments sociaux qui en découlent :
¤ L’envie
Aristote (384-322 av. J.C.) définit l’envie comme « la peine que l’on éprouve à la vue du succès de nos semblables », surtout si ce succès est mérité. Rhétorique, Livre 2, chap. X.
Cf. ce billet : L'envie : quelques définitions
¤ La pitié et l’indignation
Aristote définit la pitié comme le sentiment causé par « un malheur immérité », et l’indignation comme le sentiment que « nous éprouvons à la vue d'un succès immérité » (3). L’indignation se différencie donc de l’envie: « l’indignation est une réaction qu’on peut éprouver quand la fortune sourit à de mauvaises gens, tandis qu’on éprouve de l’envie du fait du bonheur des gens de bien » (4). En pratique, il n'est pas toujours évident de distinguer l'envie mauvaise de l'indignation vertueuse.
Cf. ce billet : L’envie et la justice : une histoire maltaise
¤ La schadenfreude
La schadenfreude est la joie que l’on éprouve au vu de l’infortune d’autrui. Loin d’être une disposition générale à se réjouir du malheur d’autrui, la schadenfreude repose sur une certaine idée que l’on se fait de ce qui est juste. Ainsi, on éprouvera de la joie quand le chauffard qui vient de vous faire une queue de poisson a été arrêté par la maréchaussée, pas s’il a un accident. Il y a là une question de mesure. La schadenfreude s’accompagne de l’idée qu’il a eu ce qu’il méritait. Ce n’est donc pas une joie intrinsèquement « mauvaise ».
Cf. ce billet : De la shadenfreude
Notes
Aristote (384-322 av. J.C.) définit l’envie comme « la peine que l’on éprouve à la vue du succès de nos semblables », surtout si ce succès est mérité. Rhétorique, Livre 2, chap. X.
Cf. ce billet : L'envie : quelques définitions
¤ La pitié et l’indignation
Aristote définit la pitié comme le sentiment causé par « un malheur immérité », et l’indignation comme le sentiment que « nous éprouvons à la vue d'un succès immérité » (3). L’indignation se différencie donc de l’envie: « l’indignation est une réaction qu’on peut éprouver quand la fortune sourit à de mauvaises gens, tandis qu’on éprouve de l’envie du fait du bonheur des gens de bien » (4). En pratique, il n'est pas toujours évident de distinguer l'envie mauvaise de l'indignation vertueuse.
Cf. ce billet : L’envie et la justice : une histoire maltaise
¤ La schadenfreude
La schadenfreude est la joie que l’on éprouve au vu de l’infortune d’autrui. Loin d’être une disposition générale à se réjouir du malheur d’autrui, la schadenfreude repose sur une certaine idée que l’on se fait de ce qui est juste. Ainsi, on éprouvera de la joie quand le chauffard qui vient de vous faire une queue de poisson a été arrêté par la maréchaussée, pas s’il a un accident. Il y a là une question de mesure. La schadenfreude s’accompagne de l’idée qu’il a eu ce qu’il méritait. Ce n’est donc pas une joie intrinsèquement « mauvaise ».
Cf. ce billet : De la shadenfreude
Notes
1. Aristote, Rhétorique, Livre 2, Chapitres IX. Hippias d’Ellis avait le premier distingué deux types d’envie : « l’envie juste, envers les personnes qui reçoivent des honneurs imméritées, et l’envie injuste, envers des personnes honorables ». Gonzalo Fernandes de la Mora, Egalitarian Envy, 2000, toExcel.
2. Robert Nozick, Anarchie, Etat et Utopie (1974), trad. PUF 1988
3. Topiques, 110, a, 2
4. ibid.
2. Robert Nozick, Anarchie, Etat et Utopie (1974), trad. PUF 1988
3. Topiques, 110, a, 2
4. ibid.
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