.Au vu des dernières données de l'Insee, l'espérance de vie a augmenté dans toutes les CSP mais les inégalités sociales devant la mort n'ont guère évolué. Chez les hommes, l'espérance de vie à 35 ans a augmenté davantage chez les cadres que chez les ouvriers -- mais l'espérance de vie à 35 ans des ouvriers a augmenté davantage que la moyenne ; chez les femmes, les écarts sont restés identiques (tableau 1).
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Espérance de vie des hommes et des femmes à 35 ans, par période et catégorie sociale (en années)
On avance parfois que les régimes de retraites devraient intégrer ces différences sociales de mortalité. Si les ouvriers vivent moins longtemps que les cadres, pourquoi ne pas leur permettre de partir en retraite plus tôt. En fait, c'est déjà largement le cas - ayant étudié plus longtemps, les cadres doivent aussi travailler plus longtemps pour faire valoir leurs droits à la retraite.
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Qui plus est, la différence d'espérance de vie entre ouvriers et cadres est largement indépendante de la nature des emplois. Certes, les ouvriers sont plus exposés que les cadres aux maladies professionnelles et aux accidents du travail. Par exemple, les ouvriers représentent 35 % des salariés affiliés à la CNAM, mais 66 % des cas d'accidents mortels (
Premières synthèses de la DARES, Mai 2002). De même, ils sont de loin les plus exposés aux produits cancérogènes:
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Proportion de salariés exposés à des produits cancérogènes
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Cadres: 3.3 %
Professions intermédiaires: 11.1 %
Employés administratifs: 1.3 %
Employés de commerce et de services: 5.3 %
Ouvriers qualifiés: 30.9 %
Ouvriers non qualifiés: 22.5 %
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Mais si le travail est à l'origine de près de la moitié des TMS (troubles musculo-squelettiques) des ouvriers de moins de 65 ans, il n'explique que 4 % de leurs problèmes cardiaques, tensionnels ou circulatoires, et 18.8 % de leurs problèmes respiratoires ou pulmonaires (cf.
Premières synthèses de la Dares, Mai 2004).
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Pour l'essentiel, les différences de mortalité s'expliquent par les différences des modes de vie. Comme le montrent les données ci-après, les ouvriers sont davantage sujets à l'obésité, au tabagisme, à l'alcoolisme que les cadres. Autrement dit, un ouvrier et un cadre qui ne boivent ni ne fument, et qui surveillent un peu leur ligne, ont probablement une espérance de vie assez comparable.
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Il y a toutefois une autre raison aux différences sociales de mortalité. Les ouvriers "consultent" beaucoup moins que les cadres. Un constat qui justifierait une politique de santé publique plus ambitieuse, notamment dans les domaines sinistrés de la médecine du travail ou de la médecine scolaire...
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(i) Les comportements à risques
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Les ouvriers fument davantage, et l'écart avec les cadres s'accroît depuis 20 ans.
Fumeurs réguliers par catégorie socioprofessionnelle
(en %)
Source : Insee. Champ : Ensemble de la population de 18 ans ou plus. Fumeur régulier : Personne déclarant fumer au moins une cigarette (ou équivalent) par jour.
De même, "la mortalité alcoolique est fortement liée à la catégorie sociale". Si l'on considère les causes de mortalité prématurée (avant 55 ans), on constate que "c’est pour les pathologies liées à l’abus d’alcool que l’indice de surmortalité des ouvriers & employés est le plus élevé : 10 fois pour l’alcoolisme et la cirrhose et 11 fois pour les cancers des voies aéro-digestives supérieures."
Source: Etudes et Résultats, janv. 2002 : la mortalité liée à l’imprégnation éthylique chronique en France en 1998 ; cf. aussi ce tableau
(ii) L’obésité
"Les manoeuvres, ouvriers (qualifiés ou spécialisés) et agents de maîtrise dirigeant des ouvriers constituent les catégories qui regroupent le plus d’obèses : de 12 % à 14 % pour ces catégories (vs 10 % pour l’ensemble des adultes). Plus la position professionnelle de l’emploi est élevée sur l’échelle sociale et moins les personnes sont touchées par des problèmes de poids. En fait, les individus de poids « normal » se retrouvent plutôt chez des professions « intellectuelles » ... Ainsi, 60% des ingénieurs et cadres ont un poids normal pour plus de 65% des instituteurs et des professeurs (vs 57 % pour l’ensemble des adultes)."
Source: Point Stat de l'Assurance-maladie, basé sur l'enquête Insee 2003
(iii) La consultation médicale
Consultation médicale au cours des 12 derniers mois selon la PCS (2003, en %)
Lecture : en mai 2003, 78,2 % des agriculteurs exploitants déclarent avoir consulté un médecin généraliste au cours des 12 derniers mois. Champ : France métropolitaine, individus âgés de 15 ans et plus. Insee, Enquête permanente sur les conditions de vie 2003.
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